[ROSE CANAPE] Pour « Rose Canapé», Evelyne Kouadjo raconte sa sexualité « épanouie » avec son amoureux, un Belge (Blanc)…et des amies. Loin des extrêmes, une vie sexuelle pas si classique pour autant…
« J’ai 29 ans et une sexualité tout ce qu’il y a de plus “ classique” : j’ai eu une dizaine de gars, je suis dans une relation monogame (ou presque) depuis 3 ans avec un Blanc, je n’ai jamais eu d’expérience “hors-norme”. Je vous propose un témoignage qui peut sembler morne (même si ma vie sexuelle ne l’est pas), mais […] je pense que ce genre de récit a aussi sa place dans votre rubrique ! »
Sa vie sexuelle, apparemment sobre, peut-être même ennuyeuse, nous a intéressés – cela permettrait de tempérer un peu la rubrique qui parle, depuis qu’elle existe, surtout des coups de la vie et des situations alambiquées.
J’ai rencontré Eva comme elle se fait appeler, un soir, dans un maquis de Marcory dans le Sud d’Abidjan. Je m’attendais à voir arriver une fille lambda, un physique sans intérêt pour aller avec une sexualité sans aspérité.
Est arrivée une grande nana d’1m70, bien enrobées, avec des rondeurs bien là où il faut, des cheveux bouclés, des gros bijoux et une paire de baskets. Eva a quelque chose de Carmen Sama la compagne du défunt Arafat Dj, en version plus intello.
Eva vient d’un petit village « très rural » dans la région de la Nawa. A 18 ans, elle est arrivée à Abidjan faire une grande école après son Bac. Aujourd’hui, elle travaille dans l’humanitaire.
Pendant une heure, elle m’a parlé de sa sexualité « classique ». Au fur et à mesure, cela s’est peut-être vu, je me suis décomposé : tout ce que je trouvais « choquant », elle le trouvait « normal ». Soit sa sexualité est beaucoup plus étrange qu’elle ne le pense réellement (bisexualité, œuf vibrant télécommandé), soit je suis un « saint » qui s’ignore. Ecoutons-là :
Ma sexualité
Je ne dirais pas que j’ai une sexualité plan-plan, parce que c’est connoté trop négativement. Je la décrirais comme satisfaisante, épanouie. Elle a une particularité que j’ai très peu exploité, c’est que j’ai le droit de voir aussi des filles. C’est un accord qu’on a avec mon copain actuel, le Blanc. J’insiste là-dessus, parce que je ne crois pas que ça serait le cas si j’étais avec un Ivoirien ou un Africain tout court.
J’ai eu deux mini-expériences depuis qu’il m’a mis cette idée en tête. Il y a une fille à qui j’ai fait un cunni, et une autre que j’ai masturbée. C’étaient des amies. Bi, pas des lesbiennes dures.
Je ne trouve pas ça bizarre de faire ça avec des amies filles. Je n’ai pas de mal à m’imaginer amoureuse et en couple avec une fille. Même si on sera obligé de gérer ça en secret. Mais pour le moment, c’est juste que ça n’est jamais arrivé, c’est tout.
Pour être plus précise, la fois où j’ai fait un cunni à cette amie, mon copain aussi était en train de m’en faire un. Comme une amie à qui j’ai expliqué, me l’a fait remarquer, ce n’était pas un plan à trois, mais deux plans à deux simultanés (Rires).
Mes dates clés
La première fois, j’avais 16 ans et lui 21 ans. C’était extrêmement banal, avec un garçon qui était mon amoureux. Il avait déjà eu quelques expériences, il était très gentil et ça s’est très bien passé. On s’était rencontrés dans un cours de vacances. Puis des heures à se voir en cachette, des appels téléphoniques interminables. Il habitait loin, la relation a duré huit mois je crois.
C’était pas douloureux, c’était pas jouissif non plus. On l’a refait assez vite et dans la foulée j’ai fait ma première fellation. C’était un peu trop précipité pour moi, mais il a amené le truc. Et au bout d’un moment, il s’est mis à diriger un peu l’acte, ce qui m’a un peu traumatisée (pas longtemps).
Je dirais qu’il y a eu deux fois où ma sexualité a changé. D’abord quand j’ai eu mon premier béguin pour une fille. Même s’il ne s’est absolument rien passé avec elle. C’était en terminale.
Le second tournant, c’est la première fois que j’ai fait l’amour avec mon troisième partenaire, j’ai senti que j’avais enfin compris comment ça marchait. Une sorte de déclic. Je me suis dit « Tiens, en fait, on peut bouger les hanches comme ça, on peut faire ce type de mouvement là », quelque chose dans ce genre là. J’avais compris comment on pouvait être active y compris dans des positions où l’on pourrait tout à fait être passive.
Je ne sais pas si j’ai envie de considérer qu’il y a un âge de la plénitude sexuelle, je préfère penser qu’il y a des des périodes de plénitude. Avant de me mettre en couple avec mon copain actuel, on s’est tournés autour pendant trois ans. Quand on s’est mis ensemble, j’ai eu l’impression qu’on avait trois ans de désir sexuel à rattraper. C’était assez fou. Je dirais que cela a duré quasiment un an. C’était sans cesse et bien.
La fois la plus folle, c’était en Yamoussoukro. Je venais de passer un mois à travailler dans une entreprise pour mon stage pratique. Je craquais pour un collègue, regards torrides dans l’arrière-cuisine. Puis il y a cette grosse fête et je me suis dit que c’était le moment. Ce soir-là, j’ai appris qu’il était avec quelqu’un. Grosse descente. Puis, la soirée se passe et en fait, je comprends que cela ne l’empêche pas de coucher avec d’autres filles. On a fini chez lui, ivres. On a fait l’amour alors qu’une amie dormait dans la même pièce. C’était marrant parce qu’il disait « come baby, come » et qu’à l’époque je ne savais pas ce que ça voulait dire.
La dernière fois, c’était hier et c’était bien. Avec mon copain, il n’y a pas toujours d’orgasme, ni même de plaisir physique, mais c’est bien quand même. Je dirais que j’ai au moins un orgasme par semaine. Ça dépend beaucoup de la position. Il y a des positions où je suis quasiment sûre de ne pas en avoir. Mais des fois, je ne cherche pas l’orgasme. J’ai envie d’un moment d’intimité ou d’un truc sportif.
Les mots
Je dis toujours « faire l’amour ». Je ne dis jamais « baiser » ou « mougou ». Même quand je parle des rapports avec des mecs dont je n’étais pas amoureuse. Dans ces cas là, je peux dire « coucher avec ».
Des fois, avec mon copain, on se parle pendant le rapport, mais on ne se dit jamais des trucs très crus. C’est plutôt le ton, la manière dont c’est dit qui va être érotique, même si c’est juste mon prénom. Cela m’a déjà traversé l’esprit d’essayer des choses, mais je ne l’ai jamais fait.
Au lit (ou ailleurs)
Je dirais que je fais l’amour environ quatre fois par semaine. Surtout le week-end. Globalement, mon copain est plus demandeur que moi. Mais comment dire, j’ai un seuil psychologique au-dessous duquel je ne veux pas aller. Je ne veux pas faire l’amour qu’une seule fois par semaine à 29 ans.
Bientôt, je compte arrêter ma contraception et j’espère que ça aura un effet sur ma libido. Je vais mettre un DIU cuivre [dispositif intra-utérin, ndlr]. Ça fait partie d’un processus général dans ma vie d’aller vers ce qu’il y a de plus naturel.
On fait l’amour chez nous, jamais dans la rue ou dans les lieux publics. Chez nous, c’est dans la chambre, la salle de bain de temps en temps, le salon maintenant qu’on a mis un rideau. Le faire hors du lit n’a rien d’exceptionnel.
On fait l’amour complètement nus à de rares exceptions près. En général, chacun déshabille l’autre.
Il y a des fois où je vais adorer être en missionnaire et qu’il soit collé contre moi. D’autres fois, j’aime bien être dessus, parce que je prends le contrôle et que c’est très orgasmique pour moi.
J’aime bien les fellations. Je vais jusqu’au bout à chaque fois, je ne conçois pas une fellation pas finie. Ce n’est pas un préliminaire pour moi. J’ai toujours avalé, oui. C’est juste que c’est plus propre et que ce n’est pas glamour de courir dans la salle de bain après pour aller cracher. C’est plus ou moins agréable. Avec mon copain, ce n’est pas désagréable.
J’aime bien qu’on me morde le haut du dos, les épaules. Il n’y a rien que je déteste absolument, quelles que soient les circonstances. Mais je n’aime pas trop qu’on me titille les tétons.
Je n’ai jamais testé la sodomie. Je me dis que je testerai un jour. Et aussi, je crois que serais intéressée par la sodomie dans l’autre sens. Le sodomiser lui, avec un gode ou les doigts. Je trouve ça intéressant de renverser le rapport dans la pénétration et qu’en plus ce soit une zone très érogène pour les hommes. Mais je n’ai même pas besoin de lui en parler pour savoir que c’est mort de chez mort. L’idée qu’on touche à ses fesses… Il ne voudra jamais.
Rouleau de scotch « pour s’attacher »
Je n’ai pas beaucoup d’accessoires. J’ai un petit martinet, du scotch qui se colle sur lui-même pour s’attacher. J’ai aussi un œuf vibrant télécommandé, mais je ne l’ai jamais utilisé avec mon copain. Je l’ai utilisé avec une amie.
Dans la tête
Quand j’étais petite, je me rappelle que j’allais parfois feuilleter des livres que lisaient mes grandes sœurs. Une saga de bouquins qui se passe à la préhistoire. La série suit l’évolution d’un couple et il y a des scènes de sexe. Des choses très classiques, ce n’était pas ambiance « peaux de bêtes et gourdins ». C’était intéressant, excitant.
Je ne suis pas sûre d’avoir des fantasmes. Je suis partante pour essayer des trucs. Mais je ne tiens pas une liste de choses que j’aimerais faire.
Je ne consomme pas de porno. Ça m’est peut-être arrivé de lire une fois ou deux des petites nouvelles érotiques sur Internet. Mais je crois que ça se limite à ça.
De la vie sexuelle de mes parents, je ne connais rien. Toutes ces choses étaient extrêmement taboues chez moi. Avec mes sœurs, on n’avait pas vraiment le droit de dire des mots comme « règles » ou « serviette hygiénique » donc le sexe n’en parlons même pas, mon Dieu.
Je n’ai même jamais vu mes parents nus. J’ai dû voir mon père en caleçon. Ma mère, si je la voyais en pantalon et en soutien-gorge dans la maison, c’était déjà tout un truc. Moi je ne suis pas pudique. Je dis pas que je vais me balader à poils devant mes enfants, mais j’aimerais juste qu’il n’y ait pas de gêne. J’essaierai de trouver le juste milieu.
Je ne regrette aucun rapport sexuel. Je ne me suis jamais sentie sale ou mal traitée. J’ai toujours fait l’amour avec des gentils garçons, vraiment.
Ce que je regrette un peu, c’est de ne pas avoir mis de capote une ou deux fois. Il ne s’est rien passé de dramatique au final, mais ça a été une source de stress pour moi. A l’époque, je n’avais pas connaissance des traitements contre le Sida qui peuvent être pris juste après un rapport non protégé.
Mon dernier étonnement au lit, c’est la découverte d’un angle. Pendant un moment, j’ai eu un peu mal en faisant l’amour. Avec mon copain, on a découvert, à cette époque, un angle qui ne me faisait pas mal (quand j’étais dessus) et qui nous apportait beaucoup de plaisir. Une découverte très cool.
Aujourd’hui j’utilise un lubrifiant et il n’y a plus de problème. Mais cet angle nous est resté.
A. KWACEE