Au Cameroun, la journée du dimanche 12 octobre a marqué un tournant politique attendu. Plus de huit millions d’électeurs étaient appelés à désigner leur prochain président, dans un scrutin à un seul tour, sur fond de lassitude populaire et d’aspirations au changement. Mais, au lendemain du vote, le pays reste plongé dans l’incertitude : aucun chiffre officiel n’avait encore été communiqué ce lundi matin, ni sur la participation, ni sur les premières tendances.
Dans la ville de Garoua, fief d’Issa Tchiroma Bakary, principal opposant au président sortant Paul Biya, l’atmosphère était à l’espoir. Les dépouillements, qui se sont poursuivis tard dans la soirée de dimanche, ont révélé une forte mobilisation populaire. « Nous avons assisté à un véritable sursaut démocratique », confiait un militant du Front pour la Renaissance du Cameroun (FRC), parti d’opposition dirigé par M. Tchiroma.
Un scrutin sous haute surveillance
Les observateurs nationaux et internationaux ont salué la bonne tenue générale du vote, bien que des incidents isolés aient été signalés dans certaines localités du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, régions anglophones toujours fragilisées par des tensions séparatistes.
L’organe en charge des élections, Elections Cameroon (ELECAM), a assuré que le scrutin s’est déroulé « dans la transparence et la sérénité », promettant la publication progressive des résultats dès la consolidation des procès-verbaux régionaux.
Cependant, plusieurs formations politiques d’opposition ont dénoncé des irrégularités locales, notamment des retards d’ouverture de bureaux de vote et des soupçons de bourrages d’urnes dans certaines zones rurales.
Paul Biya face au test de la légitimité
À 92 ans, dont 43 ans au pouvoir, Paul Biya reste le grand favori de cette élection. S’il venait à être reconduit, ce nouveau mandat prolongerait l’un des plus longs règnes politiques au monde. Face à lui, onze candidats (neuf après le retrait de deux d’entre eux) tentaient de capitaliser sur la lassitude d’une partie de la population, frappée par la hausse du coût de la vie et le chômage des jeunes.
Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre devenu son plus farouche opposant, a su mobiliser dans le Nord et une partie du Centre du pays. « Le peuple camerounais a choisi le changement, il l’a exprimé dans les urnes », a-t-il déclaré à la presse dans la nuit de dimanche.
L’attente des résultats
Selon le calendrier de la Commission nationale de recensement général des votes, les résultats provisoires pourraient être annoncés dans les 48 à 72 heures. En attendant, les autorités appellent au calme et à la patience.
Dans plusieurs quartiers de Yaoundé et de Douala, la population suit avec attention les premières estimations relayées sur les réseaux sociaux, souvent non vérifiées. Les forces de l’ordre ont été déployées en nombre pour prévenir tout débordement.
Pour de nombreux Camerounais, ce scrutin symbolise une nouvelle étape dans la vie politique nationale. « Qu’il gagne ou qu’il parte, Paul Biya ne doit plus ignorer le cri du peuple », glisse un étudiant rencontré à Bonabéri, à Douala.